mercredi 19 décembre 2012

I. Essais nucléaires dans le Sahara


Larbi relit

12. Les essais nucléaires

Je me souviens que des essais nucléaires avaient lieu dans le Sahara et qu'ils ont continué quatre ans après l'indépendance.

Sara se souvient de Reggane.

Reggane : un mot, comme un nom de femme.

Maintenant, ils font des joutes oratoires, mais seuls nos souvenirs sont vrais. Nous savons exactement ce qui s'est passé.

Sara dit : nous savons exactement ce qui s'est passé, parce que nous y étions. Je le dis, les mots faisaient partie de la machine de guerre.

Dire que la guerre n'était pas une guerre faisait partie de la guerre.

C'était la guerre même. Faire la guerre en le niant.

Je me souviens, la Radio y aidait, les mots de la Radio excluaient l'idée de guerre.

C'est comme les essais nucléaires, ils supposaient que personne ne vivait dans le Sahara, qu'un essai nucléaire ne concernait donc personne.


Alors, Larbi écrit à Jeanne.

Reggane: un mot comme un nom de femme.
Chère Jeanne, ma première lecture a omis ce passage: la mémoire est sélective. Maintenant, un souvenir me revient : en couvrant le Sboû de Timimoune, en 1993, (vous savez, ou peut-être ne savez-vous pas, ce sont des fêtes de commémoration de la naissance du prophète Mohamed, une tradition ancestrale qui témoigne de la cohésion sociale et spirituelle des Zénètes).  J'ai fait, dans le Gourara, la boucle Adrar - Timimoune - Reggane et suis passé par tous les petits villages alentour. Le lieu est loin d’être vide d’habitants. Bien sûr, je n’ai pas pu aller jusqu’au tombeau de Tin Hinan, la reine qui a inspiré Pierre Benoît pour créer le personnage d’Antinéa  dans l’Atlantide. C’est bien plus au sud. Son tombeau a été découvert par des archéologues en 1925 et son squelette a été transporté au Musée du Bardo à Alger. Son nom veut dire « elle qui se déplace » ou « celle qui vient de loin ».
Je me souviens d’Azzedine Meddour et de son documentaire "Ô combien je vous aime", il y est question de la première bombe atomique française au Sahara et des cobayes humains de cette région du Gourara exposés aux rayonnements de l'explosion et aux poussières radioactives.
Je ne parviens pas à retrouver la vidéo de ce film qui, dans les années 80, a fait grand bruit et qui a permis la reconnaissance de l’existence de ces populations cobayes par les autorités militaires françaises.
Il y a des faits que l’histoire officielle tente d’oublier. Oui, Jeanne, nos gouvernants ont accepté - c’était dans la balance des négociations d’Evian - la poursuite, pendant les cinq ans qui suivraient l'indépendance, des essais nucléaires dans le Sahara.

(à suivre...)