dimanche 2 décembre 2012

C. Souvenirs de Larbi


Larbi écrit 

Mes souvenirs sont pénibles, Jeanne.

Souvenir d'un collégien qui a vu son prof de sciences habillé en "territorial" commander un peloton d'éxécution à Boufarik et faire justice en tuant un jeune homme arrêté par la foule  après avoir lancé une grenade.
Souvenir d'un petit algérois qui a vu un camarade de quartier tué par un harki de la SAU (SAS) pris de panique quand le jeune a mis la main à la poche; il cherchait une boîte de tabac à priser: Mekla!
Souvenir de jeunes arabes dénonçant leur voisin de type européen qui se rangeait du côté des français quand il y avait des rafles. Ce voisin a fini par être arrêté; il était membre d'un réseau FLN.
Souvenir de Marie de la cité "Les dunes" sur la route de Fort de l'eau qui laissait les petits arabes l'embrasser ("petits" comme Little big man!)
Souvenir de la DST qui balançait des arabes du 3éme étage des immeubles de la CIA (Compagnie Immobilière d’Algérie).
Souvenir d'une rafle à Constantine et les soldats laissent les chiens surveiller les arabes exposés au soleil de juillet.
Souvenir de  la rue Michelet d'Alger jamais empruntée sur toute sa longueur, seulement traversée.
Souvenir de la première 404, de la DS 19, de la SIMCA 1000.
Souvenir de la Casbah barbelée et de ses "hôtels": Sphinx, Chat noir, Versailles, du 14 juillet, de Cythéria où la police des moeurs faisait des descentes, pour s'offrir de la bière Pils ou 33 export !
Souvenir des slaloms d'évitement des barrages de la police, des bérets rouges ou verts...
Souvenir du livre "Le dernier quart d'heure" d'Albert-Paul Lentin qui reste un pur exemple de l'expression de ces pieds-noirs qui avaient pris le parti des algériens.
Souvenir des articles de Mauriac et de JJSS...
Souvenir de la poignée de main refusée à de Gaulle à Tébessa.
Souvenir de la récupération du drapeau algérien abandonné par un manifestant qui a refusé de le reprendre, car il était visé par les grenadiers qui lançaient leurs grenades à partir d'hélicoptères.
Souvenir des 20 camarades de l'école primaire tués le même jour par l'armée, parce qu'ils auraient pu prendre le maquis.

Mes souvenirs sont pénibles, Jeanne.

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